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La vie de l’encre

Les Livres Anciens

Le noir de fumée s’est épaissi, englué en attendant sa dilution prochaine. Il ne sent plus le pin auquel il va peut-être redonner vie sur la page du calligraphe. Le musc et le camphre masquent la vilaine odeur de colle (viande ou poisson). Le mélange ainsi obtenu se tient en un seul morceau, solide, il est moulé sous la forme d’un bâton dont on a orné la surface lisse d’un dragon rehaussé d’or, d’un personnage en bas-relief ou encore de l’arbre qui lui a donné sa couleur.

Que l’encre chinoise se présente sous une forme solide plutôt que liquide, comme elle l’est en Occident, voilà ce qui explique qu’elle soit plus que de l’encre. Ne figure-t-elle pas, aux côtés du papier, du pinceau et de la pierre à encre, dans la liste des quatre trésors du lettré ? A ce titre, elle est une œuvre d’art.

Jusqu’au XIXe siècle, l’encre des livres imprimés présente une recette simple, dont la qualité et la stabilité sautent encore aujourd’hui aux yeux de celui qui a la chance de posséder un livre ancien, voire très ancien. Liquide, elle ne nous parvient pas sous la forme de bâtons mais déjà pliée à son usage. Puis la production d’encre devient elle aussi une industrie. Les presses d’imprimerie vont désormais plus vite, on doit ajouter à l’encre colorants et autres additifs pour la rendre plus visqueuse, accélérer son séchage. Le brillant des encres modernes durera-t-il longtemps ? On est aujourd’hui bien en peine de prédire si ces textes pourront eux aussi traverser les siècles.

 
Le libraire

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